Gestion de projet et coopération internationale : Quand « le projet » c’est de rendre le monde solidaire

Étude de faisabilité, planification, mise en œuvre, contrôle, évaluation, voilà le cycle de projet le plus souvent utilisé. Il s’agit d’un cycle avec un début et une fin précise, avec des documents qui encadrent, qui guident la démarche; avec des étapes et une planification réglées au quart de tour. En coopération internationale et pour SUCO, la gestion de projet, bien qu’elle conserve les prémisses prônées par les normes PMI, revêt plusieurs autres dimensions. Au quotidien, les phases de projet deviennent bien souvent des sous-projets en soi qui requièrent une démarche itérative et avant tout relationnelle. Qui plus est, dans bien des cas, la mise en œuvre de projet devient un levier de développement organisationnel, un prétexte pour favoriser l’acquisition de nouvelles compétences au sein d’une association paysanne ou d’un groupement de femmes, par exemple.

Un processus relationnel avant tout

Récemment, dans le cadre d’une mission préparatoire pour l’élaboration d’un projet agroenvironnemental, une conseillère volontaire a passé quelques semaines chez un partenaire afin de simplement évaluer la faisabilité des actions initialement prévues. Cette présence, bien que de courte durée, aura permis à l’association paysanne d’amorcer un processus de mobilisation autour du projet. Grâce à l’élaboration d’un simple calendrier de visites de sites et de questionnaires, conjointement avec le partenaire, ce dernier a pu saisir l’importance de travailler « par étape » : la notion de gestion de projet a commencé à faire son chemin. La présence de cette conseillère pour la phase de faisabilité aura aussi permis à l’organisation de comprendre que la mise en œuvre des activités futures allait se faire dans le cadre d’une démarche centrée sur l’apprentissage, dont la responsabilité sera partagée entre SUCO et les membres de l’association, dans une relation de co-construction, en fonction de leurs compétences, de leurs envies et des caractéristiques du contexte organisationnel. En gestion de projet de coopération internationale, travailler ensemble permet de construire une communauté saine et durable dans le cadre du projet envisagé : les relations humaines chaleureuses deviennent donc un moyen et une fin en soi. La personne volontaire a le rôle de générer et d’encourager plus de confiance, à la fois pendant le processus de gestion de projet et plus durablement, au sein de l’organisation elle-même. Des relations optimistes, intègres et confiantes rappellent aux personnes leur caractère humain et les ouvrent aux autres, permettant d’amorcer un réel changement.

« On m’a déjà dit, “je ne savais pas que j’étais capable; c’est grâce à toi que je m’en rends compte et que j’ai envie de continuer” », Éléonore Durocher Bergeron, conseillère en développement organisationnel pour SUCO au Sénégal.

Une approche participative

Au-delà de l’aspect humain, la gestion de projet en coopération internationale comme nous l’entendons, revêt un caractère participatif tout au long de la mise en œuvre.

« On ne fait pas qu’informer ou consulter les personnes que nous accompagnons dans la réalisation du projet : nous les faisons participer aux échanges, aux prises de décision, puis aux actions. Lorsque l’accompagnement a atteint un certain niveau, nous ne sommes que des observateurs fiers de leurs succès à eux », Éléonore Durocher Bergeron, conseillère en développement organisationnel pour SUCO au Sénégal.

Cette approche participative, et surtout inclusive, vise l’appropriation du projet par l’organisation partenaire. Cela peut se traduire, par exemple, par l’animation sur plusieurs jours d’un atelier pour planifier un échéancier de travail en faisant participer l’ensemble de l’association paysanne pour qu’elle élabore elle-même les différentes tâches à réaliser, puis qu’elle les partage entre les membres. Cette façon de faire, bien qu’elle requière plus de temps que dans le cadre de l’élaboration d’un projet dans un contexte nord-américain, permet à l’organisation de vivre des succès dès la conception et la planification : des succès sur lesquels nous nous appuierons pour renforcer plusieurs capacités organisationnelles. Cet exemple de planification participative donnera l’occasion d’aborder une foule de notions nouvelles pour les participants : la gestion des ressources humaines et matérielles, la gestion du temps et surtout l’importance de concevoir des actions dans un cadre logique.

Des projets qui s’imbriquent dans une vision à long terme

À la lumière de tous ces éléments, il importe de rappeler que la gestion de projet peut prendre une tout autre dimension lorsqu’il s’agit de travailler dans un contexte de coopération internationale! Non pas conçus isolément, mais plutôt en fonction d’un plan de développement à long terme, les projets de développement s’intègrent souvent dans un continuum d’actions que poseront les organisations de coopération.

Dans ce contexte, le projet n’est pas linéaire, avec un début et une fin : il sert la cause d’un objectif plus grand. Ainsi, prenons l’exemple d’un projet d’un an qui viserait l’installation de systèmes d’irrigation pour faciliter le maraîchage biologique en zone semi-aride. Ce projet, seul, paraît déjà intéressant. Mais qu’en est-il lorsqu’il s’intègre dans une stratégie quinquennale qui vise tour à tour la formation des femmes agricultrices au développement de nouvelles techniques adaptées aux changements climatiques, à l’accompagnement nutritionnel des familles rurales pour l’optimisation des cultures maraîchères, à la sensibilisation des instances locales pour un réinvestissement dans les marchés de proximité? Les résultats et les défis du projet de départ devront être analysés autrement et prendre en compte la valeur ajoutée de la planification globale. La personne gestionnaire de projet aura également une vision bien différente de la conduite de ses activités!

Pour conclure, cette façon de concevoir la gestion de projet en coopération internationale donne également tout son sens au développement organisationnel des partenaires locaux, qui non seulement sont vivement sollicités dans la mise en œuvre des projets intégrés, mais doivent également s’approprier et soutenir la pérennité des résultats. Voilà pourquoi la plupart des projets de SUCO comportent une dimension de renforcement des capacités.

« En visant l’autonomie de nos organisations partenaires, nos projets sont porteurs de fierté et d’indépendance. Lorsqu’on anime un atelier participatif où un groupe de personne se dote d’une mission à son goût, quand on accompagne un conseil d’administration à prendre ses propres décisions, en étant capable de peser chacune des options possibles, la mise en œuvre d’un projet n’est qu’un moyen de plus pour favoriser le développement, et non pas, une fin en soi! », Sophie Bourdon, représentante de SUCO au Sénégal.

–  par, Sophie Bourdon, représentante de SUCO au Sénégal et Éléonore Durocher Bergeron, conseillère en développement organisationnel pour SUCO au Sénégal

Cet article a été écrit dans le cadre du nouveau partenariat entre SUCO et l’Association des professionnels en gestion de projet PMI-Montréal.

Pour plus d’informations, consultez : « L’expertise en gestion de projet à l’international au service du développement durable »