Place à l’audace avec le Fonds Innove !

Bonjour! Mon nom est Marie-Hélène Roy. Je suis chargée de projet au volontariat chez SUCO et j’ai entre autres la responsabilité de coordonner les projets du Fonds Innove. En décembre dernier, j’ai eu le grand bonheur de visiter l’équipe pays de SUCO au Bénin et de visiter quelques-uns des projets Innove réalisés par nos partenaires. Je vous invite pour une visite virtuelle!

Pour commencer, le Fonds Innove est réalisé dans le cadre des fonds spéciaux du programme de coopération volontaire (PCV), financé par Affaires Mondiales Canada (AMC).

Ses objectifs?

Soutenir des projets incubateurs et accélérateurs d’innovation pour générer des solutions novatrices, positives et durables pour les populations marginalisées, particulièrement par et pour les femmes et les filles. Le Fonds Innove veut avant tout assurer la participation active des femmes comme actrices de changement au cœur de leurs communautés.

Il permet aussi de soutenir, chez les collectivités, les partenaires et les volontaires, une culture, le développement de compétences et des pratiques d’innovation comme moteurs de transformation sociale.

Trois processus d’appels ont été réalisés au cours des dernières années, permettant de soutenir 19 projets ! Ceux-ci sont menés par des partenaires du Bénin, Burkina Faso, Sénégal, Togo, Côte d’Ivoire, Pérou, Nicaragua et Honduras.

Pour être sélectionnés, les projets doivent se démarquer par le bien-fondé et le caractère novateur de l’initiative, la cocréation et la co-expérimentation dans le processus d’innovation, la place des axes thématiques de SUCO, dont l’intégration du pouvoir d’agir des femmes et/ou la résilience aux changements climatiques, en plus de démontrer la logique d’intervention et le potentiel d’impact pour les communautés.

Bénin

NYONÙ SI : Une initiative de lutte contre les changements climatiques qui améliore les conditions socio-économiques et de santé des femmes

Première destination : Lokossa, commune du Sud-Ouest du Bénin, pour découvrir le projet NYONÙ SI réalisé par Jeunes Volontaires pour l’Environnement (JVE), en compagnie de Bonaventure Vidjannani Agboton, volontaire en gestion de projet innovant, Christelle Ouattara, représentante pays SUCO au Bénin et Mélissa Kabre, volontaire en communication.

Au Bénin, près de 1 800 femmes transformatrices sont actives dans le secteur de transformation de poisson frais en poisson fumé. Le poisson fumé constitue une source importante de protéines accessibles aux ménages à faibles revenus mais cette industrie permet également de créer des emplois intéressants dont les femmes sont les principales détentrices. Hors, le fumage de poisson est essentiellement pratiqué de manière traditionnelle en utilisant le bois de mangrove comme combustible, ou encore les déchets récupérés dans les décharges de la ville. Les techniques utilisées constituent non seulement un danger pour la santé des femmes, mais aussi au plan environnemental ; les combustibles utilisés contribuent à la déforestation.

Le projet Innove de JVE Bénin vise à développer des fours améliorés écologiques de fumage de poisson en utilisant des biocombustibles : bio charbon, coques de coco, etc. Une solution beaucoup plus écologique et sécuritaire pour les femmes. Le projet soutient par ailleurs les femmes à s’organiser en coopérative pour mettre en place des activités génératrices de revenus (AGR) résilientes aux changements climatiques par le biais de systèmes d’aquaponie*. Cette initiative permettra aux femmes de faire l’élevage de poissons par elles-mêmes en plus de développer des cultures vivrières. Enfin, le projet a aussi permis de planter des arbres dans les communautés visées pour reboiser l’environnement.

La visite a suscité un très beau moment d’échanges avec les femmes membres des coopératives visées ainsi qu’avec les partenaires de JVE, en plus de rencontrer le 1er adjoint au maire de la commune de Lokossa (Monsieur Norbert Gangbedji).

*L’aquaponie est une méthode de culture de poissons et de plantes par un système partagé: les déchets produits par les poissons sont utilisés comme nutriments par les plantes. L’eau épurée par les plantes peut ensuite assainir le milieu de vie des poissons.

Des Comités Scolaires Genres qui soutiennent les droits des filles et luttent contre les violences basées sur le genre

Deuxième arrêt, commune d’Abomey, avec le partenaire ALDIPE.

C’est à travers des comités en environnement actifs dans des écoles de la commune que ce projet est né : des jeunes filles participantes ont partagé divers défis liés à des abus et des violences qu’elles vivent. ALDIPE a ainsi décidé de développer ce projet innovant dans l’objectif de renforcer le leadership féminin et de réduire les situations de violences et les abus qui freinent le maintien et la réussite des filles à l’école.

La méthode choisie: mettre sur pied des conseils scolaires dans 7 écoles secondaires du district et réunir des élèves, filles et garçons, des parents, des enseignantes et enseignants et des membres de la direction pour initier des collaborations et des réflexions sur ces thèmes.

Des espaces d’échanges, des sessions de formation, des campagnes de sensibilisation ainsi que des boîtes de dénonciation ont été mis en place par ces conseils scolaires au cours de la dernière année. Toutes ces actions ont permis de renforcer la prise de parole des jeunes filles, de briser des tabous sur les violences basées sur le genre et de sensibiliser les milieux sur ces thèmes. Le projet a permis de favoriser le développement d’un milieu sain et sécuritaire pour les jeunes étudiantes et de soutenir leur cheminement scolaire.

La réussite du projet est telle que certaines écoles de la commune ont maintenant l’intérêt de mettre sur pieds leurs propres conseils scolaires ; les gens reconnaissent que les élèves de ces conseils scolaires ont maintenant de la facilité à discuter avec les enseignants·es et parents sur des thématiques liées au genre, au harcèlement sexuel et aux droits des filles, alors que ces sujets demeurent sensibles et tabous dans la société.

Voici un petit tour en images d’une rencontre avec l’un des sept conseils scolaires, lors de laquelle les membres nous partagent comment le projet s’est déroulé et ce qu’elles et ils en ont retiré. Vous pouvez aussi visualiser cette courte vidéo de l’une des activités d’échange réalisée dans le cadre des 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre.

Des pratiques agroécologiques résilientes aux changements climatiques pour l’amélioration du pouvoir économique des filles-mères et femmes vulnérables

Pour terminer ce tour au Bénin, une visite au cœur des pratiques agroécologiques avec Jardins de l’Espoir, en compagnie de Helena Arroyo, volontaire en environnement et Christelle Ouattara, représentante pays de SUCO au Bénin.

Jardins de l’Espoir a proposé ce projet Innove dans un contexte où des groupements agricoles de filles-mères et de femmes vulnérables, dont plusieurs vivent en situation de handicap, font face à un manque d’accès à des fertilisants biologiques. Quoique formées sur le compostage et les techniques durables de production maraîchère sans engrais chimiques, ces femmes rencontrent de plus en plus de difficultés à accéder à la matière organique pour la réalisation de leur compost agricole. De plus, la période de décomposition du compost classique est longue et les produits de compostage collectés ne leur permettent pas de couvrir toutes les superficies. Certaines ont même dû recourir à l’utilisation d’intrants chimiques. En plus d’être nocif pour l’environnement, les coûts ne sont pas abordables pour ces femmes. Cette situation freine leur capacité à subvenir à leurs besoins et à nourrir leurs enfants.

La solution innovante et alternative proposée par JDE est de former ces groupements à la fabrication de biofertilisants liquides et de biopesticides à base de plantes locales et de produits locaux, plutôt qu’à base de matières organiques difficilement accessibles et qui prennent davantage de temps, pour une quantité souvent insuffisante. Des ateliers de formation et de discussion sont aussi prévus pour renforcer leur compréhension des impacts des changements climatiques et l’importance de pratiquer une agriculture durable. Le projet souhaite ainsi soutenir les groupements de femmes à s’approprier de nouvelles pratiques agroécologiques comme mesure d’adaptation résiliente aux changements climatiques et à améliorer leur rendement agricole.


Dirigeons-nous maintenant un peu plus à l’Ouest, au Togo et en Côte d’Ivoire, où Laurie-Eve, notre agente communication et gestion de communautés, et moi-même, François, agent à la mobilisation, avons eu l’occasion de visiter quelques projets du Fonds Innove.

En effet, nous avons eu la chance de nous rendre dans ces 2 pays avec l’objectif de rencontrer les volontaires qui collaborent avec SUCO. Nous avons bien sûr profité de notre déplacement pour rendre visite à des partenaires de SUCO et visiter les projets en cours, tout particulièrement les projets du Fonds Innove !

Togo

Contribution des femmes et jeunes à la réduction des pressions anthropiques sur les ressources forestières grâce aux pratiques innovantes au Togo

Nous avons eu la chance de passer une demi-journée avec l’équipe de WEP-Togo. Brigitte TSONYA, directrice exécutive de l’organisation, et Solange ADJIVON, cheffe de programme, ont eu l’amabilité de nous accueillir à leur bureau puis de nous accompagner sur l’un des sites du projet. Les deux ingénieures environnementales de formation ont pris le temps de nous dresser un portrait de la problématique à laquelle elles travaillent à fournir une solution.

La majorité des ménages loméens utilisent des foyers traditionnels gourmands en bois de chauffage et particulièrement polluants. Une des alternatives, le foyer à gaz, pose une importante problématique de coûts. En effet, en plus du caractère onéreux du foyer à gaz en tant que tel, le combustible a connu une augmentation de son prix. Le bois reste donc la solution privilégiée par les ménages. Cela engendre d’importantes conséquences sur la déforestation dans les régions rurales du Togo afin de répondre à la demande urbaine. Afin de lutter contre la déforestation, le projet s’étend donc sur deux zones. Au Nord, en zone rurale, sur les lieux de production ; au Sud, en zone urbaine, sur les lieux de consommation. À Lomé, la capitale togolaise, WEP-Togo facilite l’accès à des foyers améliorés. C’est le site de construction de ces foyers, géré par WEP-Togo, que Brigitte et Solange nous ont fait visiter.

Tout en étant moins polluants, les foyers améliorés consomment moins de bois que les foyers traditionnels. Cela permet à la fois de diminuer les coûts de combustible pour les ménages, mais aussi de réduire les quantités de bois à produire. Le projet du Fonds Innove garantit également l’accessibilité aux foyers améliorés via des subventions, le prix étant ainsi équivalent à celui des foyers traditionnels.

Au niveau des zones de production, le projet permet la diffusion de techniques de plantation durable. Des méthodes de gestion durable des forêts, via par exemple des cycles de reboisement, permet aux personnes productrices, essentiellement des jeunes et des femmes, de maintenir une production tout en diminuant les déplacements occasionnés par la déforestation et en maximisant les quantités produites via l’amélioration des techniques de carbonisation.

Ce projet offre donc une alternative durable et économique qui répond tout à la fois aux besoins des ménages que des communautés productrices.

Côte d’Ivoire

La pisciculture intégrée au maraîchage hors sol

Avec Bamby Traoré, notre collaboratrice spécialisée en développement et gestion de projets innovants, j’ai eu la chance de bénéficier d’une visite guidée des installations de l’Union des Sociétés Coopératives des Femmes de la Pêche et Assimilées de Côte d’Ivoire (USCOFEPCI). Si le projet du Fonds Innove qui sera réalisé avec l’USCOFEPCI n’en est encore qu’à ses premières étapes, l’expérience actuelle de l’union sera porteuse d’apprentissages pour le futur projet du Fonds Innove.

Confrontées aux difficultés d’accès à la matière première halieutique en raison de la saisonnalité des pêches, du repos biologique imposé et des effets néfastes des changements climatiques, les femmes se retrouvent en situation précaire. Sur son site, l’USCOFEPCI a développé un maillage de structures et techniques piscicoles et maraîchères afin de répondre à cette problématique.

Mme Dion, présidente de l’Union, nous a tout d’abord présenté les installations de pisciculture, qui inspireront le projet du Fonds Innove et qui visent à être répliquées sur d’autres sites.

Les différents bassins permettent de suivre la croissance des alevins jusqu’à leur maturité et d’être prêts à la consommation. Les eaux usées vont également être réutilisées pour alimenter les espaces de culture maraîchère.
L’USCOFEPCI met l’implication des femmes membres au cœur de ses projets. En fin de cycle, les produits piscicoles et maraîchers vont être vendus à un prix réduit aux femmes de la coopérative afin qu’elles puissent en faire le commerce au prix du marché. Ainsi, la pérennité des projets de l’USCOFEPCI est garantie tout en offrant la possibilité aux femmes membres de la coopérative de générer un revenu.

Ainsi, le futur projet du Fonds Innove pourra s’appuyer sur cette première expérience porteuse de l’USCOFEPCI afin de mettre sur pied une ferme intégrée utilisant des techniques respectueuses de l’environnement avec la réalisation de la pisciculture hors sol, du maraîchage hors sol et de l’aviculture. Il s’agit d’une activité prometteuse qui vise à améliorer la sécurité alimentaire et à diversifier les revenus des femmes en contribuant à la lutte contre le réchauffement climatique

Appui à l’autonomisation juridique des femmes rurales du département de Gagnoa pour un accès à la propriété foncière

Nous avons terminé notre déplacement par une visite au bureau de RIDDEF (Réseau Ivoirien pour la Défense des Droits de l’Enfant et de la Femme) où nous avons eu le privilège d’être accueillis·es par Mme Ayemou, présidente de l’organisation, afin de nous parler de ce projet de l’appel 1 du Fonds Innove.

Le projet vise donc l’amélioration de l’accès de 300 femmes de 18 à 50 ans à la terre en milieu rural, dans 15 villages de la région du Goh, le département de Gagnoa en Côte d’Ivoire.

Pour cela, cette initiative s’efforce de faire adopter des réformes et pratiques inclusives de lois coutumières visant la défense des droits fonciers de ces femmes, tout en soutenant un accès équitable accru à la propriété foncière aux femmes ainsi qu’aux hommes de 18-50 ans.

Cette fantastique visite n’aurait pu être possible sans l’implication et l’accueil chaleureux de des équipes SUCO Bénin, SUCO Togo et SUCO Côte d’Ivoire. Merci à chacune et chacun d’entre eux et elle pour les moments privilégiés passés à leurs côtés!

Crédits photo : Marie-Hélène Roy, Laurie-Eve Charbonneau, François Colinet, Bamby Traoré

Cet article ainsi que les projets qui y sont mentionnés ont été réalisés grâce au financement du Canada accordé par l’entremise d’Affaires mondiales Canada pour le Programme de coopération volontaire.