Me joindre à l’équipe de SUCO, il y a un an, m’aura permis de développer un vif intérêt pour les questions d’agriculture durable et plus précisément l’agroécologie. Si j’ai pourtant grandi en milieu rural, le terme ne m’était pas familier jusqu’à il y a un an ou deux. Aujourd’hui, je dévore tout ce qui se rattache au sujet et qui alimente ma réflexion quant aux enjeux du système alimentaire mondial. Réflexion que j’ai d’ailleurs poursuivie il y a deux semaines alors que se tenait le Forum social mondial (FSM) auquel SUCO a activement participé. À l’issue de cette semaine foisonnante en idées et débats, voici un retour sur l’atelier L’agroécologie au service de la planète, que nous avons co-organisé avec Développement et paix, USC Canada et le Centre Paysan.
Nourrir la planète durablement et convenablement
Si le système alimentaire mondial a réussi son pari des 70 dernières années, soit celui d’augmenter la quantité d’aliments sur les marchés mondiaux, il n’en demeure pas moins que la répartition de ce volume ne s’est pas faite de façon efficiente. Aujourd’hui, encore environ 793 millions de personnes sont sous-alimentées. Pendant ce temps, plus du tiers de la nourriture est gaspillé dans l’hémisphère nord de notre planète.
Qui plus est, le modèle « d’agriculture industrielle » qui domine dans la plupart des pays occidentaux et émergents n’est pas en reste en terme d’impact négatif sur l’environnement : dégradation générale des sols en raison des monocultures à haut rendement, pollution des eaux et des écosystèmes avec les intrants chimiques, émissions de gaz à effet de serre, pertes de biodiversité et j’en passe. C’est aussi l’élevage animal intensif (et les choix productifs qui en découlent) qui entraîne à lui seul près de 30 % des émissions massives de gaz à effet de serre.
En plus de ces constats inquiétants, l’agriculture industrielle actuelle crée des conditions de vie et de travail extrêmement difficiles pour les agriculteurs et agricultrices, toute provenance confondue, soumis aux aléas des marchés internationaux. De fait, 50 % des personnes souffrant de la malnutrition sont des gens qui vivent de la terre. Bref, la planète fait face à un mur et il est temps de repenser le système alimentaire. Mais comment pourrait-on en arriver à renverser la la vapeur ? Plusieurs pistes de solutions, déjà mises en œuvre par une partie de la société civile, ont été amenées tout au long du Forum social mondial.
Les pistes de solutions
Plusieurs acteurs sont arrivés à la conclusion de la nécessité d’un système alimentaire à mi-chemin entre l’agriculture de subsistance et l’agriculture intensive ; un modèle agricole qui nous permettra de réduire notre empreinte écologique, d’améliorer notre résilience face aux changements climatiques et surtout d’augmenter les rendements à long terme afin de nourrir tous les êtres qui peuplent la Terre tout en répartissant les volumes de façon équitable.
La diversification des cultures dans le temps et l’espace, mais également des variétés cultivées (abandonnons les monocultures et réintégrons les espèces qui s’adaptent localement, qui peuvent être anciennes ou qui s’intègrent à l’écosystème existant) doit être mise de l’avant. Il faut voir l’agriculture sous l’angle des écosystèmes en misant sur les synergies naturelles (miser sur des fermes qui intègrent à la fois culture, élevage, agroforesterie) et moins utiliser la machinerie qui nous rend dépendants au pétrole. Une phrase célèbre dit que rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Si on applique ce principe à l’agriculture, on peut réutiliser le fumier du bétail pour fertiliser les sols, les résidus végétaux pour faire du compost, afin de réduire les pertes et maximiser la réutilisation des déchets organiques. Ces principes, ce sont d’ailleurs ceux que SUCO met en œuvre à travers ses projets et les manuels de formation paysanne qui accompagnent les communautés que nous appuyons.
Pourquoi ne pas pousser encore plus loin et miser sur la valorisation des chaînes de production et des circuits de distribution courts ? Le système agricole doit fournir les marchés localement avec des produits moins homogènes et plus diversifiés.C’est ainsi que nous arriverons à réduire les impacts environnementaux de l’agriculture, à améliorer la qualité nutritive des aliments, à préserver et à développer les écosystèmes locaux et la biodiversité générale, mais aussi à améliorer la qualité de vie des travailleurs agricoles ainsi que l’emploi local. Au final, ce sont presque tous les problèmes liés à la crise agricole qui pourraient être résolus grâce à une transition vers des écosystèmes agricoles plus diversifiés, plus locaux, plus HUMAINS.
Le slogan du FSM cette année était « Un autre monde est nécessaire, ensemble, il devient possible ». Et, je ne sais pas pour vous, mais moi, j’ai envie d’y croire. Envie de croire qu’en misant sur notre créativité et notre potentiel, on arrivera à mettre en place de plus en plus de solutions novatrices avec l’agroécologie.