La rencontre
Dès les premiers instants de notre visite au centre écologique El Ombu, nous savions que cette rencontre allait grandement inspirer le déroulement de nos activités de sensibilisation à la gestion des matières résiduelles auprès de la population de Caraz, cette ville perchée dans la cordillère des Andes péruviennes.
El Ombu, qui tire son nom d’un arbre gigantesque qui pousse précisément dans cette région de la ville, est un site de tri des déchets domestiques où moins de dix employés travaillent afin d’améliorer la gestion des déchets de la municipalité. Créé en 2004 dans le but de remplacer ce qui n’était au départ qu’un dépotoir, ce site est aujourd’hui l’endroit où l’ensemble des résidus générés par les citoyens et citoyennes est envoyé.
Les quelques hommes qui nous accueillent sont souriants et solennels. Le chef du centre écologique, Huoman Milla Nelson Julio, se présente ainsi que ses collègues. Après un discours d’accueil chaleureux, comme le font si bien les Péruviens jusqu’à présent, il nous fait visiter le terrain et ses différentes sections, et nous révèle avec assurance le déroulement de leurs activités ainsi que les dessous du métier.
La fierté est ressentie à travers les paroles et les gestes de Nelson. Il y travaille depuis plus de dix ans et aucun détail ne lui échappe. Ses réponses sont celles d’une personne qui demeure positive concernant l’avenir du site, et ce, malgré les difficultés apparentes d’un tel travail. Après tout, avec la quantité de déchets domestiques qui augmente au rythme de l’accroissement de la population, leur travail se révèle plus essentiel que jamais. C’est d’ailleurs leur motivation première, celle d’exercer un métier nécessaire pour la ville de Caraz, mais aussi pour un environnement sain.
La visite
Chaque jour, une grande quantité de déchets est acheminée au centre. C’est alors que le travail des employés commence. Puisqu’il n’y a aucun système de tri en place dans la ville de Caraz et ses alentours, un fastidieux travail de séparation des résidus est entrepris par les travailleurs. Les ordures sont séparées en plusieurs monticules de déchets sur le site. Les résidus organiques sont séparés des résidus solides, eux-mêmes divisés en plusieurs catégories : les bouteilles de plastique, le plastique mou, le plastique dur, le métal, le papier, les déchets dangereux et les déchets ultimes.
En ce qui concerne les résidus organiques, ils sont d’abord rassemblés et séchés au soleil pour former le compost du site, dont une partie est offerte aux écoles de la région. Les déchets organiques restants sont quant à eux entreposés pour une période de six mois dans de grands bacs rectangulaires arrosés à l’occasion où y grouillent des vers de terre. À la fin du processus, le contenu des bacs est tamisé afin d’obtenir un humus pur. Cet humus est vendu aux paysans et aux paysannes des campagnes environnantes.
Pour ce qui est des résidus solides, une entreprise de recyclage de Lima les achète et les recycle. Un camion passe régulièrement au centre de tri afin de collecter certains des déchets solides selon les besoins fluctuants de la compagnie.
Tout ce travail méticuleux est réalisé par les travailleurs du lundi au samedi, de 6 h à 14 h. Cet horaire a été déterminé principalement en raison des contraintes météorologiques. Par exemple, le vent qui se lève en fin d’après-midi rend le tri beaucoup plus difficile, voire irréalisable.
Le travail des employés comporte son lot de difficultés. L’espoir de voir leur travail se simplifier se lisait dans leurs regards alors qu’ils nous partageaient leurs défis quotidiens. Leur premier souhait serait de pouvoir acquérir des machines permettant de déplacer et de compacter les déchets. Faute de budget, tout le travail est actuellement réalisé à la main, et ce, par un nombre déficient d’employés. Puisque le temps et les moyens manquent pour tout trier, ils nous ont également fait part de leur désir de la mise en place d’un système permettant de trier les résidus solides des matières organiques dans la ville de Caraz. Ce système permettrait d’éviter que les déchets se contaminent entre eux et ainsi d’obtenir des déchets comportant moins d’impuretés. Une conscientisation de la population à la séparation des déchets ainsi qu’un système sélectif de collecte des ordures faciliteraient énormément leur travail.
L’un des aspects les plus dangereux de leur travail est le fait qu’ils soient en contact avec des déchets pouvant porter atteinte à leur santé. À titre d’exemple, une grande quantité d’aiguilles se retrouve dans les sacs à ordures. Il serait également intéressant que les citoyens et les citoyennes fassent un tri préalable des déchets dangereux. Il s’agirait d’une avancée importante et fortement souhaitée de la part des employés. Ils estiment que le moment le plus décourageant de leur travail est lorsque le camion d’ordures déverse son contenu au centre écologique. Cela rappelle aux employés les longues heures qu’ils devront passer à trier la montagne de déchets qui se présente à eux. Néanmoins, ils estiment que leur amour de la terre et des champs facilite leur travail. Ils semblent soudés par cet amour de la campagne, mais également par les nombreuses heures de dur labeur qu’ils passent à s’entraider et à réaliser un travail qui en effraierait beaucoup par son ampleur.
La morale
C’est avec l’ambition d’aider ces employés dans leur travail que nous avons quitté le centre écologique. Les liens entre leur métier et notre projet sont équivoques. Souvent, nous ont-ils rappelé le besoin criant de sensibiliser les citoyens et les citoyennes de Caraz à l’impact de leurs déchets domestiques sur l’environnement. En espérant réussir, tout au long de notre projet, à mettre en valeur leur travail et à rendre hommage à ces employés essentiels au bien-être collectif.
Par Arianne Provost-Savard, Jeanne Lavallée, Marie-Alexandre Forest, Maude Normandin-Bellefeuille, Noémie Lévesque, Noémie Pelletier Deschamps et Rachel Benoit